Poésie : Qu'il me soit arraché des tétins de sa mère
Titre : Qu'il me soit arraché des tétins de sa mère
Poète : Pierre de Ronsard (1524-1585)
Recueil : Poésies diverses (1587).
Qu'il me soit arraché des tétins de sa mère 
Ce jeune enfant Amour, et qu'il me soit rendu ; 
II ne fait que de naître et m'a déjà perdu ; 
Vienne quelque marchand, je le mets à l'enchère.
D'un si mauvais garçon la vente n'est pas chère, 
J'en ferai bon marché. Ah ! j'ai trop attendu. 
Mais voyez comme il pleure, il m'a bien entendu ; 
Apaise-toi, mignon, j'ai passé ma colère,
Je ne te vendrai point : au contraire, je veux 
Pour Page t'envoyer à ma maîtresse Hélène, 
Qui toute te ressemble et d'yeux et de cheveux,
Aussi fine que toi, de malice aussi pleine, 
Comme enfants vous croistrez, et vous jouerez tous deux ; 
Quand tu seras plus grand, tu me payeras ma peine.
1. Croistrez : Grandirez.