Poésie : Gente Dame
Titre : Gente Dame
Poète : Tristan Corbière (1845-1875)
Il n'est plus, ô ma Dame, 
D'amour en cape, en lame, 
 Que Vous !... 
De passion sans obstacle, 
Mystère à grand spectacle, 
 Que nous !...
Depuis les Tour de Nesle 
Et les Château de Presle, 
 Temps frais, 
Où l'on couchait en Seine 
Les galants, pour leur peine.... 
— Après. —
Quand vous êtes Frisette, 
Il n'est plus de grisette 
 Que Toi !... 
Ni de rapin farouche, 
Pur Rembrandt sans retouche, 
 Que moi !
Qu'il attende, Marquise, 
Au grand mur de l'église 
 Flanqué, 
Ton bon coupé vert-sombre, 
Comme un bravo dans l'ombre, 
 Masqué.
— À nous ! — J'arme en croisière 
Mon fiacre-corsaire, 
 Au vent, 
Bordant, comme une voile, 
Le store qui nous voile : 
— Avant !...
— Quartier-dolent—tourelle 
Tout au haut de l'échelle.... 
 Quel pas ! 
— Au sixième — Eh ! madame, 
C'est tomber, sur mon âme ! 
 Bien bas !
Au grenier poétique, 
Où gîte le classique 
 Printemps, 
Viens courre, aventurière, 
Ce lapin de gouttière : 
 Vingt-ans !
Ange, viens pour ton hère 
Jouer à la misère 
 Des Dieux ! 
Pauvre diable à ficelles, 
Lui, joue avec tes ailes. 
 Aux cieux !
Viens, Béatrix du Dante, 
Mets dans ta main charmante 
 Mon front... 
Ou passe, en bonne fille, 
Fière au bras de ton drille, 
 Le pont.
Demain, ô mâle amante, 
Reviens-moi Bradamante ! 
 Muguet ! 
Eschôlier en fortune, 
Narguant, de vers la brune, 
 Le guet !