Poésie : Vers 1820
Titre : Vers 1820
Poète : Victor Hugo (1802-1885)
Denise, ton mari, notre vieux pédagogue, 
Se promène ; il s'en va troubler la fraîche églogue 
Du bel adolescent Avril dans la forêt ; 
Tout tremble et tout devient pédant, dès qu'il paraît : 
L'âne bougonne un thème au boeuf son camarade ; 
Le vent fait sa tartine, et l'arbre sa tirade, 
L'églantier verdissant, doux garçon qui grandit, 
Déclame le récit de Théramène, et dit : 
Son front large est armé de cornes menaçantes.
Denise, cependant tu rêves et tu chantes, 
A l'âge où l'innocence ouvre sa vague fleur, 
Et, d'un oeil ignorant, sans joie et sans douleur, 
Sans crainte et sans désir, tu vois, à l'heure où rentre 
L'étudiant en classe et le docteur dans l'antre, 
Venir à toi, montant ensemble l'escalier, 
L'ennui, maître d'école, et l'amour, écolier.